Gattaz : touche pas à mon Smic !

On le sait, toucher au Smic peut s’avérer brûlant. Mardi 15 avril, le président du Medef, Pierre Gattaz, a joué avec le feu en réclamant une réforme du Smic. Son idée ? Instaurer temporairement un salaire inférieur au Smic pour permettre aux jeunes d’entrer sur le marché du travail ou aux personnes au chômage de pouvoir en sortir. Explications, critiques et réactions, Planète Campus vous explique tout.

Le Smic, une machine à polémique

En France, le Smic est un emblème. Crée en 1970, ceux qui ont voulu s’y attaquer par des réformes se sont brûlés les doigts. Ainsi, en 1994 Édouard Balladur a dû renoncer au contrat d’insertion professionnelle (CIP), face aux manifestations étudiantes, qui leur prévoyait une rémunération à l’embauche fixée à 80% du salaire minimal. En 2006, même combat avec le contrat première embauche (CPE) souhaité par Dominique de Villepin.

Système temporaire et salaire adapté

Alors que l’Allemagne vient d’instaurer un salaire minimal au niveau fédéral, en France, la mèche est rallumée le 2 avril par Pascal Lamy, l’ex-patron de l’OMC, en évoquant « qu’il faut, à ce niveau de chômage, aller davantage vers de la flexibilité et vers des boulots qui ne sont pas forcément payés au Smic », et en proposant des jobs payés en dessous du Smic.

Mais c’est Pierre Gattaz, le président du Medef, qui récolte les foudres du gouvernement et des syndicats en expliquant qu’il a trouvé une solution pour augmenter les embauches : « Avoir temporairement un système permettant la première année, pour un jeune ou quelqu’un qui ne trouve pas de travail, de rentrer dans l’entreprise de façon transitoire avec un salaire adapté, qui ne serait pas forcément le salaire du Smic. »

 

La révolte des syndicats

Le patron du Medef estime donc qu’il vaut mieux être payé moins cher que d’être au chômage. Pour les syndicats, cette réforme paraît inadmissible : « Ce genre de proposition est indécente, le Medef devient caricatural. Nous demandons une hausse de 250 euros du Smic en plusieurs années, pour qu’il atteigne 1370 euros net », abonde Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de Force Ouvrière (FO). Quand à Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, il clame « un emploi et un salaire décent pour tous » !

Même Laurence Parisot, la prédécesseur de Pierre Gattaz a condamné les propos de ce dernier : « Proposer un salaire en dessous du Smic s’apparente à une logique esclavagiste ! »

Les économistes plus nuancés

Et si le président de la République était favorable à cette mesure ? Trois économistes, Philippe Aghion, Gilbert Cette et Élie Cohen, qui ont posé la question du Smic dans leur livre Changer de modèle, ont déjeuné hier, mardi 15 avril, avec François Hollande. « J’ai senti le chef de l’État très réceptif. Les sujets ont été évoqués sans tabou et en ­détail », explique Philippe Aghion, professeur à Harvard.  De son côté Gilbert Cette a estimé qu’on se devait d’étudier « ce qui s’est fait à l’étranger notamment en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas ».

Rejet unanime du gouvernement

Pour autant, le gouvernement souhaite clore le débat du micro Smic. Najat Vallaud Belkacem, la ministre des Droits des femmes et de la Jeunesse a réagi sur Twitter : « Smic jeunes: nous y sommes bien sûr fermement opposés. Le sujet de l’emploi des jeunes mérite mieux. Je vais en parler à Pierre Gattaz. » 

Le nouveau Premier ministre, Manuel Valls, s’est également exprimé en fin de matinée. Il a assuré que le plan d’économies du gouvernement n’entraînerait pas de remise en cause du Smic. Il n’y aurait pas besoin de « remettre en cause notre modèle social, nos règles sociales et je le dis avec force, notamment le Smic ». 

NAJAT

 « Toutes les solutions doivent être étudiées »

D’autres personnalités sont loin de condamner l’idée. Ainsi, Nathalie Kosciusko-Morizet a estimé sur RTL que « toutes les solutions, toutes les idées pour pouvoir lutter contre le chômage, en particulier le chômage des jeunes doivent pouvoir être étudiées. On ne doit pas s’empêcher de les regarder ». Quant à Eric Ciotti, le député UMP des Alpes-Maritimes, il a assuré à Sud Radio qu’il « préfère qu’un jeune travaille, même avec un salaire plutôt bas, plutôt qu’il soit au chômage ». Qui remportera le combat ? La machine à polémique est lancée. Réponse dans quelques jours.


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