Procès Chirac : la justice fantôme

Après avoir bénéficié de l’immunité présidentielle pendant ses douze années passées à l’Elysée (1995-2007), l’ex-chef d’Etat a obtenu mardi un nouveau répit. De nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer l’ « impunité » des puissants et les risques de favoriser le Front national.

Jacques Chirac sera-t-il un jour jugé ? C’est la question que l’on est en droit de se poser, après le nouveau sursis qu’a obtenu hier l’ex-chef l’Etat. Lundi dernier s’ouvrait son procès dans le cadre de l’affaire des emplois présumés fictifs de la Ville de Paris : on s’attendait à le voir enfin venir s’exprimer devant la justice. Las, le tribunal correctionnel de Paris a finalement décidé de reporter son procès, dans l’attente d’une décision de la Cour de cassation concernant un point de procédure soulevé par un de ses coprévenus.

Les différents parties devront donc se retrouver le 20 juin prochain pour arrêter un nouveau calendrier – à moins que le dossier ait d’ici là été transmis au Conseil constitutionnel, dont il faudrait alors attendre la réponse. Le procès impliquant au total dix prévenus et nombre d’avocats engagés sur d’autres gros dossiers, il faudra trouver un créneau d’un mois pour reprendre le procès.

L’un des avocats de Jacques Chirac, Jean Veil, a cependant assuré mercredi sur Europe 1 qu’il existait « une fenêtre en septembre ou en octobre pour que ce procès ait lieu ». Il est selon lui « évident » que le procès doit avoir lieu avant la fin 2011, pour éviter la campagne présidentielle de 2012. Tout le monde n’est cependant pas aussi optimiste, le PCF ayant par exemple estimé que le procès était « renvoyé aux calendes grecques ».

« Il ne faut pas s’étonner que Marine Le Pen soit à 23% dans les sondages »

Evidemment, ce report a fait grincer bien des dents. Me Jérôme Karsenti (avocat d’une des parties civiles) a ainsi affirmé : «C’est un véritable déni de justice. Aujourd’hui, on voit bien qu’il y a une justice à plusieurs vitesses, alors que la QPC (question prioritaire de constitutionalité) est une avancée démocratique. Il ne faut pas s’étonner que Marine Le Pen soit à 23% dans les sondages».

Le député socialiste Arnaud Montebourg, candidat déclaré à la primaire du PS pour la présidentielle, a dénoncé « une recherche d’impunité par la bande » (c’est-à-dire indirecte). « Cela n’est pas acceptable. Je considère que l’impunité n’existe que dans les régimes condamnables » a-t-il ajouté.

Georges Kiejman, autre avocat de Chirac, prétend pour sa part que son client n’avait joué « aucun rôle dans le dépôt de cette demande ». Au cours d’une apparition sur Public Sénat, il est même allé jusqu’à affirmer : « Et je dirais que comme tous les contribuables français, il subit la lenteur de la justice. »

Pauvre Jacques.


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