Maxeen : sex, dolls, and rock’ n’ roll

Qu’est-ce que Maxeen BLISS ?
Ce que je fais avec mon groupe ne s’apparente pas à du métal symphonique. Je suis chanteuse lyrique, c’est mon métier qui me fait vivre et me permet d’acheter les croquettes du chat, mais je n’avais pas envie d’utiliser cette voix-là pour le rock. Nous mélangeons pas mal d’influences : classique, fusion, jazz, soul, ethnique…
Mes influences : Queen, Zappa, Led Zeppelin, Kate Bush, Nina Hagen, Liza Minelli, Tori Amos, The Who, Porcupine Tree, Joy Division, Biffy Clyro, Hector Berlioz, Varèse, Peter Gabriel, Genesis, Gentle Giant, Ayreon, Barbara, Billie Holiday, etc…
Le choix du nom s’est fait il y a 6 ans, un soir, avec mon meilleur ami et autour d’une ou deux bouteilles de bon vin et d’un magnifique foie gras… Il est la réunion du prénom Maxeen, prénom de la brune dans Dans la Peau de John Malkovich, et du mot bliss, titre d’une chanson de Tori Amos que j’adore et qui signifie « béni, heureux » en anglais et « démon » en arabe…

Vous en êtes le leader… Mais qui êtes-vous ?
Libre penseuse, musicienne, photographe, agnostique, humaniste, têtue, capricorne, tigre pour les chinois, sociable à tendance solitaire, râleuse, musicologue spécialiste de Berlioz, très mauvaise jongleuse, tendance à l’autoflagellation (mais je me soigne !), chanteuse, cinglée d’équitation, un brin cinglée tout court, femme à chats, curieuse de tout car, non, ce n’est pas un vilain défaut, j’adore passer des heures à cuisiner, je suis une vraie nullité dès qu’il s’agit de plier le linge ou de repasser, d’ailleurs, je ne repasse plus, les travaux de couture m’emmerdent profondément, je suis une adepte de Desproges et de Frank Zappa, mon livre de chevet reste Leaves of Grass de Walt Whitman, je pleure en allant voir Tosca et j’adore les films d’horreur, ma préférence allant pour les films de zombies, je n’aime pas les Beatles et je déteste Gounod bien qu’il fût un très très brave homme, je suis capable de me passer en boucle un morceau, un album ou un film qui me bouleverse ce qui a pour effet de rendre dingues les gens qui m’entourent, j’ai déjà fait un week-end marathon intégral de « Buffy The Vampire Slayer » avec des potes aussi dingues que moi, je me mets en quatre dès qu’il s’agit des gens que j’aime…
Voilà en quelques mots. Je vais finir avec le questionnaire pivot que j’adore :

Mot préféré ? Musique !
Mot détesté ? Viol
Drogue favorite ? Champagne
Son, bruit préféré ? La mer en colère en Bretagne sur les rochers
Son, bruit détesté ? Les sons de la violence
Juron, gros mot ou blasphème favori ? Fuckin’ crap !!!!
Homme ou femme pour illustrer un nouveau billet de banque ? Femme, définitivement ! Janis Joplin ????
Métier que vous n’auriez pas aimé faire ? Banquière, justement !
La plante, l’arbre ou l’animal dans lequel vous aimeriez être réincarnée ? Le tigre
Si Dieu existe, qu’aimeriez-vous, après votre mort, l’entendre vous dire? Retournes-y !!!

Vous dites sur votre blog que vous pensez à Maxeen Bliss depuis votre adolescence, et qu’il a existé sous des formes et des noms différents. Qu’est-ce qui fait que cette fois-ci soit la bonne ?
Ah… C’est toute la magie de l’existence : les choses ne se font qu’à un moment précis, le moment où vous êtes enfin prêt à les recevoir. Maxeen BLISS, c’est moi qui ai mûri et qui ai enfin choisi d’être moi-même et non pas d’être ce que les gens voulaient voir en moi, ce sont les bonnes personnes rencontrées au bon moment pour qu’enfin l’alchimie se fasse. A ce moment-là, le monde semble lui-même se mettre en quatre pour vous aider…

Pourquoi avoir fait le choix d’écrire et de chanter en anglais ? (Et même de communiquer en anglais ?)
Pour Maxeen BLISS, je compose du rock, du métal, certes mélangés à d’autres styles musicaux, mais tout de même du rock ou du métal. Ma culture en ce domaine est quasi exclusivement en langue anglo-saxonne.
L’anglais est la langue du rock, c’est en pays anglo-saxon que le rock est né. Le rythme même de cette langue correspond à celui du rock. L’anglais permet souvent de résumer des idées en des phrases concises, voir même en un seul mot, chose que le français permet rarement.
J’écris aussi en français, mais cela m’amène vers d’autres styles musicaux où le français peut s’épanouir à volonté.
J’aime ces deux langues profondément, elles ne m’inspirent pas la même musique, les mêmes images, c’est tout.
Pour ce qui est de la com’ en anglais, c’est juste qu’elle rend les choses plus faciles à l’étranger où nous sommes en train de démarcher pour aller jouer, alors nous communiquons dans les deux langues.

Quels thèmes abordez-vous dans vos textes ?
On peut d’ores et déjà oublier l’amour dans le trip « chansons d’amour » : c’est pas mon truc ! Il y a des gens très doués pour ça, pas moi ! La seule pouvant se rapprocher d’une chanson d’amour c’est The Sad Song, mais c’est plutôt un morceau sur la souffrance et la rage de s’en remettre et de revivre, rien de très langoureux… !
Non, mes textes sont plus ou moins engagés : la condition féminine, les religions (nous ferons partis de ces groupes que les religieux et les bigots vont adorer… !!!!!), la bêtise humaine. Parfois, certains morceaux ne décrivent juste qu’un état émotionnel à un instant précis comme Don’t Wanna Be The Only One ou encore Nevermore.

Vous êtes auteur-compositeur-interprète. Quelle est votre méthode de travail ? Comment une chanson voit le jour ?
Souvent, une chanson me prend par surprise ! Je ne fais pas partie de ces auteurs/compositeurs qui s’astreignent tous les jours à s’asseoir au bureau ou au piano et se forcent à composer.
Il m’arrive d’avoir des périodes de 3 ou 4 mois sans qu’une musique ne vienne. Avant, cela me faisait paniquer, mais maintenant, je sais que c’est normal. Parfois, 3 ou 4 morceaux me viennent en l’espace d’une semaine et dans ces cas là, il y a urgence. Je m’enferme et j’écris ce qui vient, je l’arrange, enregistre une démo que je vais donner aux garçons ! Généralement, le texte vient dans la foulée.
Qu’est-ce qui déclenche ce processus créateur ? Je ne sais pas trop, tout peut le déclencher, une musique, une peinture, un film, les infos, un petite phrase entendue au détour d’un café, tout ce que je sais, c’est que lorsque cela vient, le morceau arrive quasiment en entier dans ma tête et le plus difficile, le plus long c’est de lui donner corps sans trahir l’idée première qui est toujours la meilleure.
« Maria Magdalena » est l’exemple typique de la façon dont cela fonctionne.
J’habitais alors porte de Saint Ouen avec mon meilleur ami pour colocataire. C’était mon tour d’aller faire les courses. La veille, j’avais regardé, ou plutôt pris en pleine figure, le film Magdalena Sisters. Je descends donc mes cinq étages, parcours une centaine de mètres quand soudain, le riff de Maria se met à chanter dans mon crâne. C’était tellement fort que j’ai fait demi-tour et suis remontée à toute vitesse à l’appartement. Mon ami, surpris me demande ce qui se passe et je ne sais pas trop ce que je lui ai répondu, sûrement un truc du genre : « Super idée, peux pas faire les courses, à plus tard, suis là pour personne ». Il m’a à peine vue durant les deux jours qui ont suivi, mais il a entendu le morceau se monter. Dans ces cas-là, j’oublie le temps, j’oublie de manger, de dormir, et le plus étrange c’est que je n’en sors pas fatiguée mais pleine, apaisée et nourrie. Par contre, je suis généralement incapable de me souvenir de ce que j’ai pu faire, dans quel ordre sont apparues les choses entre le moment où l’idée survient et le moment où le morceau est dans la boîte… C’est étrange et agréable cette impression de n’être qu’un outil : quelle part vient de moi et quelle part vient de quelque chose d’autre, de plus grand, que je ne maîtrise pas, ce quelque chose que Frank Zappa surnommait « La Grande Note » ?…

Vous sortez un premier album bientôt : « Pornomusical dolls ». Pourquoi ce titre ?
C’est le titre d’un des morceaux : les poupées pornomusicales… Tout un programme !!!!
Pourquoi ce titre ? Il interroge, intrigue, provoque… Il sonne aussi, c’est la musicienne qui parle, là !!!!
Parce qu’il représente bien à lui tout seul le côté engagé des textes : engagés, mais jamais sans humour…
Et puis… il va nous permettre de faire une pochette d’album drôle et provocante et cela amuse d’avance les sales gosses que nous sommes restés…

Qui vous produit ?
Pour le moment : nous ! Et c’est un boulot de dingue de tout faire tout seul, de devoir penser à toust mais c’est aussi une joie parce que cela nous force à nous remettre en question, à repousser nos limites et à apprendre encore et encore : enregistrer, mixer, démarcher, essayer de se transformer en dieux du marketing, tout un tas de domaine pour lesquels nous n’avions pas été formés initialement. C’est une formidable aventure, épuisante, mais elle nous fait grandir avec elle.
Bon, soyons francs, on ne serait pas contre l’arrivée d’un bon producteur et surtout de toute l’infrastructure qui l’accompagne. Tout cela prend un temps fou et nous coûte énormément d’argent : nous ne sommes pas fortunés alors c’est solidarité et système D !

Vivez-vous de votre musique ?
Personne dans le groupe ne vit de la musique à part moi, en tant que chanteuse lyrique. Notre rêve c’est que Maxeen BLISS nous permettre d’en vivre un jour, alors on s’acharne et on tient bon !

Recevez-vous des subventions ou des aides ?
Nous sommes subventionnés par nos familles et nous-mêmes ! C’est vrai qu’on n’a pas vraiment mis notre nez dans tous les méandres de l’aide à la création…

En tant qu’artiste, quel est votre rapport au web, et comment l’utilisez-vous ?
C’est un merveilleux outil de visibilité. Pour le moment, il nous permet d’être écoutés et de rester en contact avec les gens qui nous suivent. Par la suite, nous l’utiliserons pour vendre notre musique ainsi que nos produits dérivés : t-shirts et casquettes « logotés » arrivent bientôt…

Que pensez-vous de la loi Hadopi ?
Qu’elle est inutile et totalement en retard sur son temps ! Elle va être infernale à mettre en place et génèrera des injustices… Tout cela est d’une telle hypocrisie : internet met à mal les grosses maisons de disque, oui, mais les prix exorbitants pratiqués pour les CDs et les DVDs durant des années n’ont fait qu’encourager la fraude…

Vous semblez traumatisée par vos années d’études au conservatoire… Avec le recul, pensez-vous que cette académie reste la meilleure pour apprendre les bases des techniques, ou bien pensez-vous qu’elle aurait besoin d’être dépoussiérée ?
Je pense y avoir appris des techniques et désappris le naturel, l’instinct, ce qui vous rend unique et non pas un bon produit bien formaté et maté…
Très sincèrement, le problème est présent dans l’étymologie même du mot « conservatoire » : conserver, conserve… Il faut conserver les traditions, ne pas sortir du cadre… Si seulement « conservatoire » s’écrivait « concervatoire », peut-être y aurait-il possibilité d’épanouissement…
Alors, ce cadre convient à certains qui ont besoin d’être cadrés, mais si vous ne rentrez pas dans le cadre… On essaye de vous y faire rentrer de force…
Ce n’est pas d’un dépoussiérage dont a besoin le conservatoire (attention, je ne parle pas des petits conservatoires et des écoles de musique où souffle bien souvent un vrai vent de liberté, où l’esprit créatif insuffle de magnifique idées à des gens qui s’y battent corps et âme pour leur art), non, il a besoin d’être totalement repensé. Pourquoi alors ne pas s’inspirer des écoles anglo-saxonnes où on ne vous enseigne pas seulement votre instrument, où on vous rend polyvalent, prêt à affronter la grande réalité de ce métier : il faut avoir pas mal de cordes à son arc pour s’en sortir. J’ai souffert du fait que mon côté créatif n’ait jamais été stimulé, j’ai souffert de ne pas pouvoir manquer des cours pour aller faire des concerts (j’espère qu’ils se sont assouplis depuis…). Ma première prof de chant, celle qui m’a inscrite au concours d’entrée, m’a avoué des années après que, si elle m’y avait inscrite, c’était parce qu’elle était sûre que je saurai me battre pour ne pas perdre mon âme… Quel programme !
Et puis, il y a eu l’après CNSM : les Grandes Ecoles sont réputées non seulement pour la qualité de leur enseignement mais aussi pour le fait qu’elles n’abandonnent jamais leurs élèves dès qu’ils en sont sortis et qu’il y a aussi tout un réseau qui se crée à l’extérieur. Le CNSM se veut être une Grande Ecole : alors pourquoi nous abandonner dès que nous en sommes sortis ? Nous étions censés rencontrer des agents, être guidés, introduits dans le milieu… Il a bien fallu se rendre à l’évidence qu’une fois le prix de chant en poche, c’était « démerde-toi » ! Je reçois de temps en temps des mails provenant du département « chant » du CNSM avec des annonces d’auditions, mais ça ne va pas plus loin… Si j’étais la seule dans ce cas, je me dirais que c’est parce que je suis nulle, mais nous ne sommes pas tous nuls quand même !!!! Hormis ceux d’entre-nous dont le professeur de chant avait encore un pied dans le milieu, nous n’avons jamais reçu d’aide d’aucune sorte pour nous mettre le pied à l’étrier de la part de cette grande maison.
Alors peu importe, j’ai toujours eu l’habitude d’en chier pour obtenir ce que je voulais, cela n’aura été qu’une fois de plus…

Propos recueillis par Florence Porcel

Retrouvez-nous sur Facebook et Twitter (@PlaneteCampus) et soyez les premiers informés !


« »

© 2024 Planete Campus. Tous droits réservés