Laurent Gbagbo : l’erreur de la France ?

Une semaine après la chute de Laurent Gbagbo et l’accession à la présidence d’Alassane Ouattara, les doutes sont toujours permis sur l’implication de la France dans l’arrestation du président déchu. Etait-ce une erreur de la part de l’Hexagone ?

Juste après l’arrestation de Laurent Gbagbo, qui s’accrochait au pouvoir depuis dix ans, Alain Toussaint, proche conseiller de l’ancien président, assurait que c’est la France qui a remis Gbagbo aux forces d’Alassane Ouattara. « Le président Gbagbo a été arrêté par les forces spéciales françaises et remis à des chefs de la rébellion », avait-il déclaré.

La France avait alors démenti, affirmant qu’à « aucun moment » les forces françaises n’étaient entrées « dans les jardins ou la résidence » de Laurent Gbagbo. Propos repris par Guillaume Soro, Premier ministre d’Ouattara, Ali Coulibaly, ambassadeur de Côte d’Ivoire en France, puis François Fillon. Selon ce dernier, « le comportement des forces françaises a été exemplaire. » En clair : la force Licorne a respecté à la lettre la résolution 1975 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui consiste à « protéger les civils » et « prévenir l’usage d’armes lourdes ». Ni plus, ni moins.

Le soutien de Licorne se serait cantonné à des bombardements aériens, favorisant ainsi l’avancée des troupes pro-Ouattara et des forces de l’ONUCI. Faux, a répété Alain Toussaint à Bruxelles, qui reste persuadé que « ce n’est pas l’ONUCI qui arrêté le président Gbagbo, ce sont les forces spéciales françaises qui l’ont remis aux rebelles. » Ahoua Don Mello, le porte-parole du gouvernement de Laurent Gbagbo va même plus loin, affirmant que la France « n’a pas d’autre objectif [que] d’assassiner » l’ancien dirigeant. Laurent Gbagbo a-t-il été tué au moment de son arrestation ? Non.

Un proche de l’ex-dirigeant, Guy Labertit, a reconnu que « si la France n’avait pas agi, Gbagbo n’aurait pas été arrêté. » En effet, c’est grâce à plan fixé par la France avec l’ONU que l’opération a été menée avec réussite. Ce qui soulève des critiques envers Nicolas Sarkozy pour avoir soutenu trop ouvertement le candidat Ouattara. Ce serait même une erreur, selon un expert de l’Afrique cité par L’Express, car le nouveau président risque d’apparaître comme « un homme de la France, ce qui n’est pas idéal pour pacifier le pays. »

Pour autant, peut-on reprocher à la France, qui a perdu 9 soldats après un bombardement des forces de Gbagbo en 2004, de s’être autant impliquée dans le conflit ivoirien ? « Les soldats français de la force Licorne […] ont évité à la Côte d’Ivoire un génocide savamment planifié par Laurent Gbagbo », défend Gouali Dodo, député ivoirien, pour Abidjan.net.

La France a largement participé à la sortie de la Côte d’Ivoire de l’impasse politique dans laquelle elle se trouvait depuis plusieurs mois. Voire années, si on prend en compte les dix ans du mandat de Gbagbo qui ne devait en durer que cinq.

Le succès de l’opération française pourrait également être un message fort adressé aux dictateurs africains. Même si certaines populations pourraient regretter de voir la différence entre les interventions en Libye et en Côte d’Ivoire, et les non interventions en Syrie et au Yémen, par exemple. Deux poids deux mesures, en somme.

[poll id= »115″]

Photo: Reuters


« »

© 2024 Planete Campus. Tous droits réservés