Dogmatique Antichrist

Retour sur Antichrist, film scandale du dernier festival de Cannes, à l’occasion de sa sortie Dvd le 4 novembre.

2009 est un crû aux arômes de scandale. Depuis Irréversible de Gaspar Noé, dont les mouvements syncopés de caméra provoquaient l’évanouissement collectif, personne n’avait vraiment dérangé le festival de Cannes. Ecce Antichrist. Le brûlot de Lars Von Trier est une œuvre de mauvais augure vouée aux gémonies.

Serait-ce le laconisme du titre, trop autosuffisant, trop connoté, qui n’aurait plus sa place dans un monde occidental débarrassé de ses démons judéo-chrétiens, qui condamne Antichrist à la vindicte ? Serait-ce la monstration en gros plan de mutilation d’organes génitaux ? La misogynie latente du propos qui assène que « La nature est l’église de Satan » et que la femme est la nature et que donc, par syllogisme… ?

L’histoire ? Un couple (Charlotte Gainsbourg et Willem Dafoe), désirant se consacrer sans entraves à leurs ébats, coupe le babyphone parental. Le bambin, attiré par l’aventure et les flocons de neige, se défenestre. S’ensuit une légitime culpabilité maternelle que le père, hélas psychanalyste, tente de soigner. A l’issue d’une démonstration thérapeutique digne des meilleures psychologies de bazar, le couple décide de se réfugier dans une forêt, à Eden (notons au passage la subtilité des références).

La gêne intense que provoque ce long-métrage provient moins de la crudité des scènes sadiques et masochistes que de la tension oscillatoire qui fait sans cesse hésiter entre le génie et le médiocre. Ce film fait immanquablement penser à Salo ou les 120 jours de Sodome de Pier Paolo Pasolini. Chez ce dernier, tout est à l’avenant : asphyxiant jusqu’à la nausée, l’infernale danse des cercles (de la merde, du sang) enserre le spectateur jusqu’à l’implosion. Or, chez Lars Von Trier, les respirations frôlent le sublime. Des images sensualistes et oniriques consacrent la chair. Ici, un pouls qui bat sous une peau frémissante, là, un grain de peau révélé dans l’intime. Une plongée dans l’inconscient qui sombre, une Charlotte Gainsbourg hypnotique qui avance dans une forêt irréelle, en demi-teintes.

La critique semble en vouloir à Lars Von Trier de réveiller des démons enfouis, du Marquis de Sade jusqu’à Georges Bataille. Ouvrant les antichambres de l’enfer, celles qui sentent le soufre et le sang, le cinéaste danois s’enlise parfois dans le ridicule lors, par exemple, des prosopopées du renard. Mais malgré cet embrouillamini conceptuel, il parvient à déranger et à mettre en scène une catharsis hallucinée et hallucinante.


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