Syrie : le monde règle ses comptes avec la Russie

Alors que la Guerre en Syrie semblait cheminer lentement, mais sûrement vers une issue diplomatique, sous l’impulsion du leader de l’insurrection, Ahmed Moaz al-Khatib, des Nations unies, des puissances arabes et occidentales et même – croyait-on – de la Russie, le Kremlin a réitéré son soutien militaire au régime de Damas… Au même moment, un missile sol-sol, tiré par l’armée d’el-Assad, entraînait la mort de 31 personnes dans le nord de la Syrie. Comment la communauté internationale ripostera-t-elle au soutien de la Russie au dictateur syrien ?

Il y a quelques jours, les chefs respectifs de la diplomatie russe et américaine convenaient « de la nécessité que les Etats-Unis et la Russie usent de leur influence respective sur les parties [les rebelles syriens et les partisans de Bachar el-Assad, ndlr] pour promouvoir un processus de transition politique viable ». Ce mardi, c’est un tout autre discours qu’a donné le Kremlin par l’intermédiaire d’Anatoly Isaikin, le patron de l’entreprise d’exportations d’armes Rosoboronexport : « Nous continuerons de remplir nos engagements sur les contrats de la vente d’équipements militaires ».

Quel superbe retournement de veste ! Comment les Russes comptent-ils faire pression sur le dictateur syrien pour qu’il dépose les armes, rencontre les leaders de la rébellion, démissionne, puis abandonne son pays, tout en lui fournissant l’arsenal militaire dont il a besoin pour écraser dans le sang l’insurrection syrienne ? En plus de révéler son cynique double-jeu, Moscou continue de bloquer les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU… Pendant ce temps, les Européens s’interrogent sur l’opportunité de lever l’embargo sur les armes à destination de Damas, naturellement pas pour soutenir la dictature, mais pour favoriser les révolutionnaires syriens.

Pourquoi la Russie continue-t-elle de se rendre complice des massacres orchestrés par Bachar el-Assad en apportant de l’eau à son sinistre et belliqueux moulin ? Tout simplement parce qu’elle entretient avec la Syrie un partenariat ancien et particulièrement juteux… Ainsi, le montant total des ventes d’armes que la patrie de Poutine aurait livrées au régime syrien en 2011 s’élèverait, selon Le Figaro, à un milliard de dollars. Parmi cet arsenal militaire se trouveraient, des systèmes de défense antimissiles, des moyens de réparation du matériel abîmé durant le conflit, mais ni avion de combat ni hélicoptère d’attaque, si l’on en croit le Kremlin.

Le régime de Bachar el-Assad bénéficie surtout de son shopping russe des années 2000 : des missiles sol-air, des roquettes antichars, des systèmes de défense anti-aérienne, etc. Entre 2007 et 2011, toujours selon Le Figaro, Moscou aurait été le principal fournisseur d’armements de Damas… Armements aujourd’hui utilisés pour massacrer des milliers de citoyens syriens. Ce mardi, un missile sol-sol a tué au moins 31 d’entre eux, dont 5 femmes et 14 enfants, dans le quartier populaire d’Alep (Nord de la Syrie), selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Le régime de Damas serait le responsable. Ce qui fait de son fournisseur et allié russe, un complice.

Car la coopération militaire entre les deux pays, la Russie et la Syrie, semble avoir été ravivée par la guerre civile. Ainsi, la marine russe a pu renforcer ses effectifs en Méditerranée orientale. Une manière de « [matérialiser] le soutien affiché par Moscou à son allié syrien et de [mettre] de nouveau en lumière l’intérêt de la Russie pour la Méditerranée et le Moyen-Orient », selon le chercheur de Harvard, Igor Delanoë, mais aussi de « mettre en garde l’Occident contre une tentative d’appliquer à la Syrie un scénario libyen. »

Voilà pourquoi la Russie poutinienne continue de ralentir les tractations onusiennes pour intervenir – militairement ou diplomatiquement – en Syrie… Et de bloquer avec son veto les résolutions de l’ONU… Et de soutenir le dictateur syrien Bachar el-Assad.

Photo : Bachar el-Assad et Vladimir Poutine à Moscou, le 19 décembre 2006 (Sergei Karpukhin/Reuters).


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