Egypte : la police laissera-t-elle les manifestants renverser le président Morsi ?

Dans la nuit du mardi 4 décembre au Caire, la police égyptienne a laissé des dizaines de milliers d’opposants au chef de l’Etat, Mohamed Morsi, encercler le palais présidentiel. Action surréaliste. Au même moment, sous une pluie d’injures, le nouveau pharaon filait en catimini. L’apparente abdication de la police anti-émeute, l’audace des manifestants, l’impression de déjà-vu charriée par les slogans… Tous ces éléments semblent converger vers l’idée d’une seconde révolution !

Une nuit blanche rythmée par les « Dégage »

Hier soir, des dizaines de milliers d’Egyptiens, parmi lesquels de nombreux membres de l’opposition laïque et libérale, ont défilé au Caire pour protester contre le décret élargissant les pouvoirs du chef de l’Etat et le projet controversé de Constitution. Plusieurs manifestants sont parvenus  – en sectionnant les barbelés installés autour du terrain – à encercler le palais présidentiel, situé dans la banlieue cairote, Héliopolis.

Au même moment, des centaines d’autres opposants au « pharaon islamiste » ont campé sur la place Tahrir. Soutenus par des militants 2.0, qui ont pu organiser via les réseaux sociaux une collecte de couvertures et de nourriture, les squatters ont déclaré qu’ils quitteraient les lieux le jour où Mohamed Morsi renoncera à ses pouvoirs élargis.

Une police quasi-absente

Et pendant ce temps-là… Que faisait la police ? Si la police anti-émeute a commencé par arroser les manifestants de gaz lacrymogène dans l’optique de les disperser, elles a ensuite battu en retraite. Pourquoi les policiers ont-ils abandonné le navire – mais pas son « lâche » de capitaine escorté hors du palais  – aux mutins ? Pourquoi ont-ils permis indirectement l’instauration d’un siège ? Cela ne s’était jamais produit… Même pendant la révolution qui avait renversé Hosni Moubarak en 2011.

A l’aube, le palais d’Ittihadiya n’avait plus la même allure : 2 000 irréductibles continuaient de faire trembler ses murs – recouverts de graffitis anti-Morsi – en reprenant les terribles slogans du Printemps arabe : « Dégage ! » et « Le peuple veut la chute du régime ». Les forces de l’ordre, elles, restaient tapis dans l’ombre, passives, silencieuses, invisibles.

Une « Révolution sur le palier du président »

Et si le titre du journal indépendant Al-Watan était prémonitoire ? Et si les émeutes cairotes continuaient de s’étendre au reste du pays ? Et si une seconde révolution était en marche en Egypte ? C’est ce que semblent craindre les Etats-Unis qui ont exhorté l’opposition à « manifester pacifiquement ».

L’Egypte vit une profonde crise politique depuis le décret du 22 novembre, qui permet à Mohamed Morsi, premier président islamiste du pays, non seulement d’étendre ses pouvoirs, mais surtout de mettre ses décisions et la future Constitution du pays hors de portée de la Justice. Or, le projet de loi fondamentale, adopté par une Commission dominée par les islamistes, est accusé d’aller à l’encontre de certains droits fondamentaux, dont la liberté d’expression, et de renforcer l’application de la charia.

 


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