Montebourg vs Mittal : la nationalisation de Florange, un pas vers la collectivisation ?

Et si un rouge se cachait parmi les éléphants roses du gouvernement ? Et si derrière l’ancien candidat de la « désindustrialisation » aux primaires socialistes, devenu le ministre du Redressement productif, se tapissait un redoutable stalinien, un partisan de la collectivisation de l’industrie ? Et si sous couvert d’une nationalisation temporaire du site sidérurgique de Florange – aux mains d’ArcelorMittal – Arnaud Montebourg entamait un processus d’appropriation collective des moyens de production ?

Soyons sérieux. Quels sont les faits ? Le 1er octobre 2012, ArcelorMittal annonce sa volonté de fermer sa filière liquide – la production d’acier brut – et fixe un ultimatum aux potentiels repreneurs des hauts fourneaux : le 30 novembre. Problème : la filière liquide seule est invendable. Or, la famille Mittal refuse de vendre l’aval de l’activité, le traitement et la finition de l’acier.

Jeudi 22 novembre, Arnaud Montebourg évoque une nationalisation temporaire – un gros mot terrible qui évoque les nationalisations de l’appareil industriel menées sous l’impulsion de François Mitterrand en 1981 – de l’aciérie de Florange. « L’éventualité d’un contrôle public, même temporaire, doit faire l’objet d’une étude sérieuse par le gouvernement, et c’est […] ce à quoi nous nous sommes attelés depuis plusieurs jours », déclare-t-il devant les membres du Sénat.

Expropriation du Géant de l’acier ? Pas vraiment. Le lendemain, vendredi 23 novembre, les ministres du Redressement productif et du Travail (Michel Sapin) précisent dans un communiqué qu’il « ne s’agit évidemment pas de nationaliser l’ensemble du secteur sidérurgique français » mais de faire pression sur la famille Mittal qui doit « envisager un processus de cession de l’ensemble du site […] pour faciliter une reprise de Florange ».

Non seulement la nationalisation est possible juridiquement, mais elle se révèle essentielle économiquement. La disparition de l’aciérie de Florange entraînerait une hécatombe sociale marquée par des milliers de licenciements. Par ailleurs, elle pénaliserait la balance commerciale de la France en faisant croître le volume des importations d’acier.

ArcelorMittal s’empresse de répliquer aux menaces de M. Montebourg : « La vente des activités aval de Florange mettrait en péril la viabilité du reste des activités en France où le groupe emploie 20 000 salariés. » C’est ce site qui fournit « les clients parmi les plus importants du groupe, en particulier dans le secteur automobile, avec des produits à forte valeur ajoutée. » Mais, le ministre du Redressement productif balance aux ordures les paroles du Géant mondial de l’acier ! Paroles qui n’ont, selon lui, aucune valeur depuis qu’ArcelorMittal a abandonné le site de Gandrange malgré sa promesse d’investir en 2006.

Aujourd’hui, lundi 26 novembre, le ton monte encore d’un cran. Pour M. Montebourg, les méthodes d’ArcelorMittal « relèvent du non-respect des engagements, du chantage et des menaces ». « Quand j’ai déclaré « nous ne voulons plus de Mittal en France » [ces propos parus dans Les Echos ont provoqué l’ire du PDG du groupe sidérurgique], j’ai voulu dire que nous ne voulons plus des méthodes de Mittal en France. » En réponse, la famille Mittal s’est dite « extrêmement choquée » par les propos du ministre.

La menace d’un « contrôle public temporaire » d’ArcelorMittal qu’agite frénétiquement M. Montebourg n’est pas une tentative de collectivisation de l’industrie sidérurgique. C’est un épouvantail de gauchiste ! C’est un moyen de pression dans les négociations entre le gouvernement et le Géant de l’acier. C’est une solution – parmi d’autres – pour sauver Florange, son activité stratégique et son bassin d’emploi. Est-ce aussi une punition ?

Crédit photo : Mathieu Cugnot/AP

 


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