Très zens Stereophonics

Vingt ans de britpop, des albums encensés par le public alors que les critiques leur réservent un accueil plus mitigé, malgré un parcours pas toujours aisé, les Stereophonics « carry on », nous titillant l’ouïe de leur pop mélancolique et caustique. À l’occasion de la sortie de leur dernier album Keep Calm And Carry On, nous avons rencontré Adam (guitare, chœurs) et Javier (batterie), aussi sereins que le titre de l’album le laisse présager. Et pour cause : abouti, les rabibochant avec la guilde journalistique, Keep Calm And Carry On marque une maturité musicale certaine.

Si Bouddha avait été une rock star, c’eût été Adam. Voix traînante et profonde, l’air doux contrastant avec sa formidable silhouette, Adam baille en guise d’introduction, signe de divine détente plutôt que de fatigue. Javier, dynamique et enjoué, lui emboîte le pas. Les deux comparses incarnent parfaitement l’esprit de Keep Calm And Carry On, album double qui balade de berceuses graves en morceaux échauffés.

Votre dernier album est plus minimaliste. Est-il plus facile ou plus difficile de composer de la musique minimaliste ?
Adam : C’est plus compliqué. Il faut être discipliné pour ne pas être tenté d’essayer des tas de choses différentes.
Javier : C’est difficile de trouver juste l’évidence.

Pourquoi un tel changement ?
Adam : Nous avons surtout changé de producteur et donc de processus d’enregistrement. Chaque chanson devait être encore plus puissante que la chanson précédente.

Certains critiques trouvent votre album particulièrement mélancolique…
Javier : Le groupe a toujours eu deux facettes : un côté émotionnel, rêveur et un côté festif et sarcastique. Je pense que cet album contient ces deux aspects même si certaines personnes le considèrent comme plus mélancolique. Nous ne parlons pas de sujets politiques ou sociaux, sauf de la façon dont ils nous affectent, mais de la vie, de nos expériences. Notre parti-pris à ce sujet est résolument optimiste : ok, nous sommes attristés mais continuons d’avancer.

Vous tentez des incursions dans l’electro, notamment avec Beerbottle
Adam : J’aime le rap, le hip-hop, la dance. Nous avons beaucoup de respect pour ces musiques et la meilleure façon de leur rendre honneur est de les confronter. Nous ne sommes pas effrayés par la nouveauté, nous aimons essayer. Cela nous permet de nous renouveler, d’étendre nos horizons.

Vous avez une relation conflictuelle avec les critiques, semble-t-il…
Javier : Oh, oui. Tout le monde, a un certain niveau, a envie d’être honnête !

Comment est reçu Keep Calm And Carry On ?
Javier : L’accueil est fabuleux. Les critiques estiment que c’est un des meilleurs albums du groupe. C’est génial d’avoir une telle adéquation entre ce que les gens ressentent et ce que l’on essaie de transmettre.
Adam : On écoute les critiques quand ils sont gentils avec nous !

La scène britpop est très concurrentielle. Est-ce que cela influe sur votre façon de travailler ?
Adam : Non, quand tu écris, tu écris pour toi-même, pas pour un public. Sinon, tu n’es pas honnête envers toi-même. Ça ne nous influence pas, par contre ça affecte l’industrie. Mais si on l’écoute, l’industrie est toujours affectée. (Rires)
Javier : Je crois que nous devenons plus sages avec le temps, que nous nous amusons plus que jamais. À ce stade de notre carrière, nous sommes plus à l’écoute de nos sensibilités que de toute autre chose. C’est une période vraiment incertaine pour l’industrie de la musique donc, de toutes façons, mieux vaut travailler pour soi.

Le titre de l’album est Keep Calm And Carry On (Rester calme et continuer). Mais qu’est-ce qui vous énerve vraiment ?
Javier : Moi, rien !
Adam : Le titre est généralement la touche finale de l’album. Ce motif était récurrent dans les chansons, dans les paroles. Il y a des crises mais on finit toujours par arriver à les traverser. Si quelque chose nous rend un peu fou, « we just keep calm and carry on ».

Est-ce que cela vous dérange que les gens téléchargent illégalement votre musique ?
Adam : Non, c’est comme quand nous étions jeunes et que nous empruntions les albums des autres et que nous les enregistrions. Maintenant, c’est juste à grande échelle. Cependant, c’est dommage que les gens pensent que c’est la seule façon de se procurer de la musique. Il faudrait tout de même changer cette façon de penser car beaucoup d’artistes ne peuvent produire sans financements. Si tout était gratuit, plus personne ne jouerait de la musique. Les musiciens seraient obligés de prendre des jobs pour se débrouiller et cela affecterait leur capacité créative.

Vous avez vingt ans de carrière et certainement beaucoup d’interviews derrière vous. Y a t-il une question qu’on ne vous a jamais posée ?
Javier : J’espère mais je ne sais pas, il faudrait qu’on nous la pose pour savoir ! Adam : Comme vous l’avez dit, nous avons fait beaucoup d’interviews, certaines questions sont pertinentes, d’autres pas. C’est mieux quand les questions concernent ce qu’on fait, c’est-à-dire la musique. Il y a beaucoup de questions sur la célébrité, les potins. Nous essayons de se concentrer sur le groupe plutôt que sur les rumeurs.

Quand vous écoutez votre musique, quelles images vous viennent en tête ?
Javier : Moi, ça me rappelle les moments où nous avons conçu ou enregistré la chanson. Quand je la joue, toute l’énergie d’alors me revient.

Parce que lorsque l’on écoute votre musique, des images métaphoriques ou cinématographiques traversent l’esprit…
Javier : Oui, je suis d’accord avec cela. Il y a une vraie imagerie dans cet album notamment à cause des paroles.

Vos clips sont, à ce sujet, très esthétiques. Les concevez-vous vous-mêmes ?
Adam : L’expression visuelle fait partie du processus créatif de la musique. Kelly écrit les scénarii des clips et réfléchit à leur traitement esthétique.

Crédits photo : © Søren Solkær Starbird


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