Le pain dur jusqu’au 15 février

L’image finale du Christ de nouveau mis en croix résume à elle seule le thème de la pièce, l’avènement d’un ordre nouveau. Place nette est faite, désormais tout le monde se pique de Progrès. Celui-là même contre lequel tonne Claudel (comme Baudelaire ou Flaubert et d’autres écrivains de l’ère industrielle). Ce mythe du Progrès, héritier bâtard  et polymorphe des Lumières, du positivisme ; est le vrai héros de la pièce (voyez ce ploutocrate de Turelure et son fils Louis Napoléon, colon de la première heure). Et le grand perdant de ce conte pathétique, c’est le Christ Lui-même, vendu pour quelques dizaines de francs à la toute dernière scène.

Claudel antimoderne ? Avec Le pain dur assurément. La pièce se dresse intelligemment contre les veaux d’or en vogue (et plus que jamais adorés aujourd’hui) à savoir l’Argent roi et le négoce pour lesquels Péguy et Bernanos, également antimodernes, ont eu des mots très durs.

Second volet de la célèbre trilogie claudélienne (L’otage/Le pain dur/Le père humilié), Le pain dur voit la famille des Coûfontaine se déchirer : Turelure, le puissant patriarche, a déshérité son fils et exige la main de sa fiancée, Lumir. Celle-ci, tiraillée entre l’amour de son pays natal et celui de son mari, qui veut l’emmener sur des terres fraîchement conquises en Algérie, choisira finalement son pays, la Pologne ; après avoir orchestrer le meurtre de Turelure avec Sichel, sa propre maîtresse, une pianiste juive apatride.

Saluons la prestation de Tatiana Stépantchenko (dans le rôle de Lumir), qui est très touchante comme Sichel est agile et séduisante. Hervé Van Der Meulen campe un imposant Turelure moliéresque (un poil monolithique ?). Seule la prestation de Robert Bouvier (Louis) est, à mon goût, peu convaincante. Alain Barsacq et Agathe Alexis (Sichel dans la pièce) prennent le parti d’une mise en scène épurée, qui fonctionne très bien (cette incessante pluie, c’est superbe) jusqu’à l’intervention des bonhommes en bleu ( !) pour installer les décors en se dandinant, qui est purement gratuite.

Il faut entendre ce grand texte avec lequel Paul Claudel prévient superbement de la dangerosité d’une société exclusivement matérialiste. Quoi de plus contemporain ?

Pour plus de renseignements, consultez la page web du théâtre de l’Atalante (http://www.theatre-latalante.com/site/le_pain_dur.html).

La dernière est lundi prochain, n‘hésitez plus !

Réservation au théâtre de l’Atalante


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