24 propositions d’un député socialiste pour lutter contre l' »apartheid territorial, social, ethnique »

En janvier, Manuel Valls avait lancé l’expression d’« apartheid territorial, social, ethnique » pour désigner le phénomène qui se passait dans les banlieues et les quartiers populaires. Vendredi 6 mars, il doit diriger un comité interministériel à la citoyenneté et à l’égalité où il se prononcera sur la politique de la ville. Philippe Doucet, député socialiste du Val d’Oise et maire d’Argenteuil de 2008 à 2014, adresse à cette occasion une lettre ouverte au premier ministre intitulée « 24 propositions pour lutter ment contre l’apartheid territorial, social et ethnique ». Certaines propositions sont soumises à controverse notamment celle qui permettrait « dans les quartiers en situation d’urgence sécuritaire et/ou sociale, la mise sous tutelle temporaire par l’État ».

Parmi ses propositions, l’ancien maire d’Argenteuil préconise d’autoriser les statistiques ethniques sous contrôle de la Cnil notamment dans l’attribution des logements sociaux.

Afin de lutter contre la ségrégation spatiale socio-économique, il désire réformer la loi sur le droit au logement opposable (DALO). Celle-ci donne des logements aux pauvres dans les quartiers pauvres, ce qui ne joue pas en faveur de la mixité sociale.

Philippe Doucet invite à élever le nombre de logements sociaux à 30% dès 2020 au lieu des 25% en 2025 prévu actuellement, sans pour autant dépasser le taux de 50%. Les sanctions envers les communes doivent être appliquées plus sévèrement. En terme de fiscalité, il juge les compensations (DSU, DDU) insuffisantes et conseille une réforme en profondeur.

Le député du Val d’Oise a également avancé des mesures afin d’intéresser les habitants des quartiers défavorisés à la vie politique en rendant le vote obligatoire et l’inscription sur les listes électorales automatiques. Le vote obligatoire sous-peine d’amende existe déjà dans certains pays comme en Belgique où le taux d’abstention est très bas. Cette mesure pose certaines questions. Certes, aller voter est un devoir, mais encore faut-il croire aux hommes et femmes politiques. Le vote obligatoire ne va-t-il pas avec une réelle comptabilisation du vote blanc ? Comment sanctionner les abstentionnistes ? Une amende semblerait déplacée s’ils se trouvent dans une situation d’extrême pauvreté…

Autre moyen pour intéresser les jeunes à la citoyenneté : le « service civique obligatoire d’une durée de 6 mois » pour les jeunes âgés de 16 à 18 ans annoncé par le François Hollande. L’« ouverture de la naturalisation pour les personnes âgées de plus de 65 ans qui ont vécu en France et qui ont un enfant français » est également suggérée.

Puis, parce que l’éducation passe par les parents mais également par l’école, Philippe Doucet propose de créer une école des parents afin d’intéresser les adultes à la scolarité de leurs enfants et de rendre obligatoire une rencontre parents-professeurs par trimestre tout au long de la scolarité.

Il faut également lutter contre la ségrégation scolaire importante. Tous les élèves doivent avoir les mêmes chances.

Les professeurs doivent être motivés pour transmettre leurs savoirs et les valeurs de la République. Pour cela, l’ancien maire d’Argenteuil propose de mettre en place d’un système d’incitation financière pour les professeurs qui travaillent dans les quartiers sensibles.

Après l’école vient les études et le travail ; et il reste de nombreuses choses à entreprendre. Afin de favoriser l’égal accès à l’emploi des jeunes, Philippe Doucet propose d’instaurer un programme de rencontre avec les dirigeants d’entreprises, des anciens élèves ou des acteurs culturels pendant la scolarité. Il invite également à une réforme de la formation professionnelle afin qu’elle cible davantage les demandeurs d’emploi.

En ce qui concerne la sécurité, il propose de multiplier par trois en cinq ans le nombre de policiers issus de l’immigration et établir en Île-de-France un seuil minimum de policiers par habitants. Au Royaume-Uni, l’approche de la relation police/habitant diffère de celle qui a cours en France. Les policiers sont accompagnés par des civils ayant la même origine que les habitants du quartier afin de faciliter le contact. Certes, cela n’est pas parfait mais nous pourrions nous en inspirer et l’améliorer.

La lettre ouverte indique également que les associations de lutte contre le racisme et les discriminations doivent être en mesure d’effectuer des campagnes de « testing » pour les entretiens d’embauche afin de pointer les actes de discrimination.

Philippe Doucet a rendu public quelques propositions afin de lutter contre « l’apartheid territorial, social et ethnique ». Il existe déjà différentes possibilités au sein des politiques de la ville. La France a été l’un des premiers pays avec le Royaume-Uni a s’intéresser aux politiques urbaines dans les années 1980. On peut citer l’Anru ou même les dispositifs mis en place par l’Union européenne.

En effet, l’Union européenne n’est pas compétente dans ces domaines, mais elle met à disposition des fonds (FSE, FEDER) qui peuvent être utilisés pour lutter contre la ségrégation urbaine. Le réseau Urbact permet également aux villes d’échanger leurs pratiques, leurs expériences et leurs projets afin d’optimiser leur chance de réussir.

Alors oui, il faut réformer, inciter au changement par la loi… Mais les textes de loi et les règlements doivent être accompagnés d’une vraie volonté de changement… Le problème de mixité sociale est loin d’être nouveau en France et les mesures pour lutter contre la ségrégation non plus…


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