Tété, retour aux sources

Après plus de trois ans d’absences, Tété revient le 22 février, avec son tout nouvel album. » Si le « style Tété » – toujours sobre et virevoltant – est intact, « le premier clair de l’aube » conjugue à merveille les nouvelles influences du natif de Dakar. Marqué par ses multiples voyages sur les terres-mères de la soul et de la folk, Tété signe un retour plein de vie, de joie et de sincérité sur la scène française.

Tété, comment ça va ? Quelle est l’ambiance avant la sortie de ce 4e album ?

C’est toujours la même pression. J’ai eu la chance de faire de la musique mon métier. Ce n’est pas donné à tout le monde donc c’est un sentiment mêlé. Il y a forcément du trac, on se demande comment ça va se passer. A côté de ça, je suis très excité à l’idée de retourner sur la route pour le faire entendre. Surtout que « le premier clair de l’aube » c’est un album dont la genèse a été intense.

Justement, quelle a été cette genèse ?

Le dernier album est sorti en octobre 2006 et à l’époque, on a mis en place un petit système qui consistait à tourner avec des artistes anglo-saxons, en France. Comme ça, on pourrait faire l’inverse plus tard. C’est donc comme ça que je me suis retrouvé à tourner à l’étranger, en Australie et aux Etats-Unis. Au contact de ces musiciens, dont John Butler et Jeff Lang, je me suis vraiment pris une claque car ce sont des guitaristes phénoménaux. Ils ont une implication dans la musique au quotidien qui est très forte. C’est vrai que ça m’a fait beaucoup de bien de fréquenter des gens comme ça. Moi, j’ai la chance de faire mon métier dans des conditions qui sont très confortables du fait d’avoir un label, un attaché de presse… quand on voyage avec des artistes indépendants, toute cette équipe n’existe pas. Ils font tout eux-mêmes et ils ont autant d’énergie pour jouer deus heures pendant leurs concerts. Quand on voit ça, ça booste forcément.

C’a été comme un retour aux sources…

Oui complètement. J’avais aussi l’envie de me confronter au public anglo-saxon. Quand ça fait trois albums qu’on essaye de faire de la musique née dans ces pays-là, on se demande comment eux ressentent ce que je fais. Puis, le fait de côtoyer des musiciens anglophones, c’était également très intéressant. Des très bons musiciens, il y en a évidemment partout. Simplement, quand on joue avec un type dont la musique est l’expression même de qui il est, on apprend plein de trucs. Les anglophones ont ça en plus, cette musique fait partie de leur culture, c’était celle de leur père, de leur grand-père… Ils m’ont appris plein de choses sur les accords, sur l’écriture. C’est génial.

« fais toi plaisir et va au bout de ce truc-là. »

Ces rencontres se ressentent dans ton album, c’était une obligation pour te renouveler ?

En fait, ça faisait très longtemps que je voulais faire ça mais j’avais un peu peur. Le fait d’avoir la chance de faire de la musique depuis vingt ans, d’être dans un label, de garder ce label, c’est une grosse chance mais c’est aussi la sécurité. J’avais envie de sortir de cette zone de confort. Aussi, c’est mon 4e album, le dernier avec mon label. On sait que c’est un métier qui est en train de mourir à petit feu. Du coup, c’était peut-être mon dernier album créé avec le confort qu’apporte une grande structure, avec de gros moyens pour bosser.  Je me suis dis « fais toi plaisir et va au bout de ce truc-là. »

Tu as rasé tes dread-locks, pourquoi ce changement de coiffure ?

C’est plus qu’un simple changement de style. Ca marque la fin d’un cycle et le début d’un autre. Je pense aussi que la culture rasta a été pas mal dévoyée ces dernières années pour le meilleur et pour le pire. C’est-à-dire que la vulgarisation de cette culture a permis au plus grand nombre d’y avoir accès par le rayonnement de la musique jamaïcaine. Ca, c’est génial. Maintenant, les dreads, à la base, c’est le signe d’une religion spirituelle avec ses interdits. Les vrais rastas ont un régime alimentaire très restrictif par exemple – sans sel, sans crustacés notamment – et à un moment, il y avait un problème de sens. Je veux dire, tu ne peux pas le faire à moitié. Porter des dreads, s’il n’y a rien derrière, juste pour faire le beau-gosse, ça aurait été mentir à moi et aux gens.

On t’as vu récemment à la télévision dans « Tété ou Dédé » sur France 5, ce fut une belle expérience ?

J’ai adoré cette émission. Déjà la possibilité de passer pas mal de temps avec André Manoukian qui est un puis de culture, qui est aussi plus posé que moi dans la vie. Ca vous fait grandir. La première saison se déroulait aux Etats-Unis et je n’avais pas encore fais tous ces voyages. J’avais une soif de ce pays là et de sa culture musicale. C’est ça qui m’a permis de me rendre compte que derrière chaque type de musique, chaque son, il ya une histoire. Puis, c’est vraiment ça qui a fait le lien de cet album. Le fait d’avoir ouvert ces portes-là m’a fait comprendre qu’il y avait de nombreuses choses à apprendre aux Etats-Unis.

Cette force sociale dans la musique, c’est quelque chose que tu ne peux trouver qu’aux Etats-Unis ?

Attention, je n’ai jamais voulu dire que c’était pour la qualité des musiciens. Il y a de très talentueux artistes en France aussi. Seulement là, toutes les musiques dont il est question sont nées là-bas. Il y a une manière de faire les choses quand elles sont ancrées dans le culturel. Pour prendre un exemple, c’est un peu comme le vin pour les Français, il y a un savoir-faire qui n’existe nulle part ailleurs, même dans les autres pays vignerons. Aux Etats-Unis, c’est la musique. Ca n’en fait pas forcément des  musiciens plus doués qu’ailleurs mais pour apprendre, c’est là qu’il faut aller.


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