Algérie : François Hollande reconnaîtra-t-il les crimes de la colonisation ?

Une question sensible est soulevée depuis qu’une visite en Algérie est prévue à l’agenda de François Hollande. Va-t-il reconnaître devant le peuple algérien le passé colonial et la responsabilité de la France dans les crimes de la colonisation ? En visite le mercredi 19 et le jeudi 20 décembre à Alger et à Tlemcen, les Algériens attendent beaucoup de la venue du chef d’Etat français.

François Hollande ne prend pas à la légère la rencontre avec son homologue algérien. L’objectif est de relancer l’amitié entre les deux pays et les échanges économiques. Il a réuni pour cela une délégation colossale composée de 200 personnes dont plusieurs ministres, responsables politiques (comme Jean-Pierre Chevènement, ami de l’Algérie, ou encore Jean-Pierre Raffarin qui a fait plusieurs déplacements dans le pays), des dizaines d’hommes d’affaires, écrivains, artistes et une centaine de journalistes. C’est la plus importante délégation pour un président français en déplacement en Algérie. Aucun prédécesseurs de François Hollande n’a encore trouvé les mots justes pour tourner la page du passé douloureux dans ce pays, le défi est de combler cette lacune qui laisse toujours les Algériens sur leur faim après les visites des chefs d’Etat français.

François Hollande va prendre la parole jeudi devant les deux chambres du Parlement algérien. Il veut poser un « regard lucide » sur la colonisation et la guerre d’Algérie. Il avait déjà fait un premier pas dans cette direction l’automne dernier, reconnaissant la « sanglante répression » menée à l’encontre des Algériens par la police française pendant les manifestations du 17 octobre 1961 à Paris qui a fait des dizaines de morts du côté des manifestants. Mercredi, dans l’éditorial du quotidien algérien El Watan, on pouvait lire : « La reconnaissance du passé colonial et des crimes de la colonisation apaisera, enfin, les mémoires encore douloureuses, rendra justice aux victimes et mettra également fin aux instrumentalisations et calculs politiciens entretenus de part et d’autre. »

A défaut d’un traité d’amitié, les présidents Abdelaziz Bouteflika et François Hollande prévoient de faire une « déclaration conjointe ». Le premier attend un « partenariat d’exception » et le second veut mettre en place un « dialogue politique sur les grands enjeux internationaux », d’abord sur la question du nord du Mali où les islamistes radicaux terrorisent la population. La France veut être appuyée par l’Algérie lors d’une éventuelle intervention internationale dans cette zone.

Outre la défense, la France veut conclure des accords dans l’industrie, l’agriculture, la culture, l’enseignement et la formation. Selon le Premier ministre Abdelmalek Sellal, 7 à 8 accords vont être signés dans ces secteurs.

Il est aussi question de la construction d’une usine Renault près d’Oran pour produire au minimum 25 000 véhicules par an à partir de 2014. Le constructeur automobile en crise dans l’hexagone veut profiter des ventes croissantes en Algérie pour répondre à la demande. François Hollande s’exprimera également devant les étudiants de l’université de Tlemcen, jeudi. Le président « soulignera à cette occasion que les questions d’éducation, d’échanges universitaires et de formation seront au coeur de l’agenda bilatéral », annonce le porte-parole diplomatique de l’Elysée.

La visite de François Hollande entend faire oublier celles de ses prédécesseurs. En 2003-2004, Jacques Chirac avait été accueilli avec beaucoup d’enthousiasme, mais les relations franco-algériennes se sont dégradées l’année suivante, lorsqu’il a été question d’inscrire dans les manuels scolaires français le rôle positif de la colonisation. En 2007, Nicolas Sarkozy avait réussi à plaire, mais peu de temps après sa visite en Algérie, il a reçu une association de Harki, ce qui a gâché les aspects positifs de la rencontre avec Abdelaziz Bouteflika.


« »

© 2024 Planete Campus. Tous droits réservés