Les prisons de Marseille violent-elles les droits fondamentaux ?

Des rats en libre circulation, des fenêtres sans vitres, des cellules sans électricité, des douches inexploitables, la prison des Baumettes à Marseille cumule tous les signes de l’insalubrité, voire du taudis dans ce lieu où la surpopulation carcérale représente 149 %. Avec son rapport qui a fait l’effet d’une bombe, Jean-Marie Delarue, contrôleur général des prisons, tire la sonnette d’alarme sur les conditions abominables dans lesquelles vivent les détenus. Il appelle le gouvernement à prendre des mesures urgentes pour rétablir les droits fondamentaux des prisonniers.

Les termes utilisé par Jean-Marie Delarue pour qualifier les conditions de vie aux Baumettes sont très forts et justes au regard des descriptions qu’il fait de la prison qu’il a visitée pendant dix jours. « Inhumaines », « effroyables », « révoltantes », « violations graves des droits et des libertés fondamentales », sont les termes que l’on retrouve dans le Journal Officiel où son publiées ses observations.

« Voici, par exemple, le constat que deux personnes détenues font de leur cellule : absence de la partie supérieure de la fenêtre , fil alimentation téléviseur coupé (absence de prise),  pas de lumière (ampoules manquantes), pas de veilleuse pour les surveillants de nuit, pas d’interphone d’urgence, w.c récent mais non fixé au sol, chasse d’eau quasi inexistante, pas de cloison d’intimité, lavabo bon état mais fuite au sol au niveau du siphon, pas de miroir, réfrigérateur très sale et infesté de cafards, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, murs sales, dégradés et presque couverts d’inscriptions en tous genres, nombreuses araignées et cloportes, sols sales, nombreux détritus, pas de cabines de douche ni d’eau chaude, aucun placard ni rangement, pas de quoi s’asseoir, pas de table. »

La nuit, il n’est pas rare que les gardiens circulent parmi les rats pendant leur ronde, dans l’obscurité et avec une simple lampe torche. Les surveillants ont été attaqués plusieurs fois par les rats, ce qui a traumatisé certains d’entre eux au point de ne plus passer dans les étages la nuit. Lors de sa visite, Jean-Marie Delarue a même aperçu des rats se servir dans les plateaux repas déposés au sol, ainsi qu’un détenu boire l’eau des toilettes, las d’attendre que son lavabo soit réparé.

La violence, maîtresse des lieux

Dans cette situation qui viole les droits fondamentaux, le climat est tendu et il est très difficile de canaliser les attitudes violentes qui jaillissent du sentiment d’abandon total. En moins d’un an, les médecins ont relevé 8 plaies profondes, 7  fractures, 14 contusions multiples, 3 traumatismes crâniens, un viol, et la liste est encore très longue. Les détenus sont livrés à eux-même et certains passent parfois six heures dans une cours parsemée de détritus, n’ayant pas d’autres divertissements. Parmi les 1 800 personnes incarcérées, seulement 9 prisonniers travaillent dans un atelier et 160 exercent une activité dans les services généraux.

Jean-Marie Delarue a adressé son rapport à Christine Taubira, ministre de la justice et à Marisol Touraine, en charge de la santé. La première a répondu en s’engageant à améliorer l’hygiène, à augmenter le nombre de détenus dans les services généraux et à faire appel à des moniteurs de sport pour les occuper et lutter contre l’ennui qui terrasse la prison. La rénovation de l’aile B2 (celle qui est en meilleur état) est prévue à partir de 2017, mais le personnel affirme que ces efforts ne suffiront pas, car tous les détenus ne pourront pas être transférés dans les cellules retapées. Les personnes qui vivent au quotidien aux Baumettes sont sceptiques quant à l’idée de l’amélioration de leurs conditions de vie ou de travail. Le problème est signalé depuis 20 ans, mais rien n’a jamais été fait.

 


« »

© 2024 Planete Campus. Tous droits réservés