DSK : une leçon pour les enquêteurs américains

En attendant l’audience exceptionnelle de Dominique Strauss-Kahn, qui débute aujourd’hui à 17h30, le récent retournement de situation concernant la crédibilité de Nafissatou Diallo soulève des interrogations. Par exemple : comment les enquêteurs ont-ils fait pour mettre autant de temps pour trouver ces éléments compromettants sur la plaignante ?

Peu de temps après le début de l’affaire DSK, les médias s’étaient intéressés à la victime présumée de l’homme politique, Nafissatou Diallo. Les différentes enquêtes, dont une assez importante du New York Times mi-juin, ne semblaient pas trouver de points noirs dans le passé de la femme de chambre du Sofitel. Elle semblait blanche comme neige, si j’ose dire : employée modèle, femme modeste, mère dévouée.

Seulement, jeudi 30 juin, soit un peu plus d’un mois après les faits, le même New York Times citant ses propres sources affirme que les procureurs ne croient plus en la théorie du viol. La cause aux nombreux mensonges sur le passé de Nafissatou Diallo, notamment sa conversation téléphonique avec un détenu pour savoir comment soutirer un maximum d’argent à DSK, et les quelques 100 000 dollars versés par un groupe de généreux donateurs sur son compte. Cité par LeNouvelObs.com, l’avocat Mars-Pierre Stehlin trouve « surprenant qu’au bout de plus d’un mois, des éléments sur cette jeune  femme, jusqu’ici présentée comme une personne sans histoire, soient aujourd’hui  susceptibles de lui donner un tout autre visage. »

Si tous les éléments révélés par le New York Times sont vérifiés – réponse à partir de 17h30 –, nous sommes en droit de nous poser la question sur le professionnalisme du procureur. Prenons par exemple le fait que Nafissatou Diallo ait menti sur sa demande d’asile, la défense et le procureur auraient dû commencer par vérifier les documents officiels. Pourquoi alors cet élément ne sort que maintenant ? Deuxième exemple concernant les 100 000 dollars sur son compte : c’est simple et rapide à vérifier aussi. Troisième exemple avec la conversation téléphonique : si le détenu était sur écoute, pourquoi l’enregistrement n’est connu qu’aujourd’hui ?

Philippe Boulet-Gercourt, correspondant du Nouvel Observateur à New York, fustige : « Il est sidérant qu’un procureur ait bâti un dossier d’accusation avec des trous aussi énormes et se soit acharné aussi longtemps. » Si le journaliste reconnait qu’ « il est possible, bien sûr, que les procureurs n’aient pas découvert immédiatement cette conversation. D’après le New York Times, les découvertes qu’ils annonceront ce matin ont devancé celles de la défense », il se demande tout de même comment « les doutes de l’accusation ne [sont] pas apparus dès les premiers jours de leur enquête. »

Un mois et demi d’enquête plus tard, on en sait enfin plus sur Nafissatou Diallo. A moins qu’elle ne soit une professionnelle de la double-vie, le procureur devrait certainement se remettre en cause.


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